Cession et reprise d’entreprise : piloter les mécanismes invisibles du projet de transmission
- inoury4
- 24 oct.
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Aux 500 000 dirigeants susceptibles de prendre leur retraite dans la décennie 2020 en France*, il faut ajouter le nombre de parties prenantes (salariés, partenaires, fournisseurs, clients) concernées plus ou moins directement par les cessions et reprises d’entreprises : la dynamique de changement liée aux transmissions devient de par son ampleur et ses impacts un phénomène de société.
A côté des chiffres et du mouvement global, il faut tout autant considérer la réalité de chaque entreprise, à son échelle : 500 000 situations spécifiques, autant de projets qui s’ancrent dans l’identité singulière d’une communauté de travail soudée par des années de collaboration autour d’une dirigeante, d’un dirigeant, qui passe le relai.
Une transmission d’entreprise est une affaire complexe, dans ses aspects techniques, financiers, organisationnels, juridiques, mais également dans ses mécanismes les moins palpables : la dimension sociale qui conditionne l’adhésion au projet, le capital immatériel des compétences, la culture qui devra continuer à cimenter le collectif…
Avec le changement de capitaine, l’entreprise va vivre l’une des transitions les plus décisives de son histoire, qui implique, pour le cédant comme pour le repreneur, de considérer dans le pilotage de la démarche des sujets à la fois stratégiques et humains.
La transmission de l’entreprise : pas un projet mais quatre types de projet à mettre en cohérence
Pour assurer la réussite de la transmission, la réflexion stratégique fait entrer dans l’équation des projets de différentes natures, portés par plusieurs acteurs :
Le projet du Dirigeant cédant, qui, avec la vente, confie les rênes du collectif à un nouveau responsable. A ce projet professionnel s’ajoutent les aspirations personnelles de l’après-direction. S’il s’agit d’une entreprise familiale, le système de la famille entre également en ligne de compte.
Le projet du Dirigeant repreneur, qui va reprendre la tête des équipes pour les conduire vers une nouvelle étape de l’histoire commune et peut-être un autre cap.
Les projets des parties prenantes, salariés, administrateurs, partenaires financiers, etc. : leur investissement dans la suite de l’aventure entrepreneuriale dépendra de leur degré d’adhésion au projet du repreneur.
Le projet entrepreneurial, qui donne sens à l’ensemble de la communauté professionnelle : s’inscrira-t-il dans la continuité ? Sera-t-il en rupture ? Comment assurer son renouvellement ?

Chacun de ces acteurs a une intention propre, chacun de ces projets a une logique interne mais, de surcroît, les intentions comme les projets interagissent, s’influencent mutuellement et évoluent les uns par rapport aux autres.
L’enjeu pour le pilotage : conserver une vision claire des mécanismes en œuvre pour éviter les confusions, maîtriser les connexions, déverrouiller les points de blocage, identifier de nouvelles opportunités d’avancement dans la démarche…Pas une transition mais trois dynamiques de changement à piloter
La transmission ouvre une étape dans laquelle plusieurs transitions vont se déployer et, tout comme les projets, interagir. Peuvent être anticipées :
la transition liée au passage de relai : nouvelle gouvernance, évolution du management, autres choix stratégiques et organisationnels, adaptation des compétences… ;
la transition liée aux enjeux de l’environnement externe (écologiques, énergétiques, numériques…) : l’entreprise s’y adapte chaque jour mais devra réinterroger ses démarches à l’aune du projet de reprise ;
les changements à l’intérieur même du projet de transmission : ajustements, avancées ou freins dans la négociation…

Aux interactions entre les types de projets et de transitions s’ajoutent ici le mouvement et la notion d’adaptation.
L’enjeu pour le pilotage : identifier les dynamiques, les rythmes, les sujets de transformation, comme un chef d’orchestre s’assure de l’harmonie de l’ensemble des instrumentistes.Réussir la transmission : une réflexion systémique, entrepreneuriale et centrée sur l’humain
Toutes ces dimensions interdépendantes font naître une forte complexité qu’il est possible de maîtriser au mieux en utilisant trois principaux leviers :
Considérer la multiplicité des projets et des transitions à l’échelle de la stratégie, en employant l’approche systémique, à la fois grille de lecture et raisonnement permettant de visualiser les interactions, révéler les mécanismes invisibles, déceler les paradoxes, les leviers, les choix stratégiques, ajuster les dynamiques, coordonner acteurs et experts…
Associer transmission et projet entrepreneurial : l’entreprise telle qu’elle va devenir, son potentiel de développement, comptent au moins autant que la valeur de ses actifs. Ce cap est formalisé dans le projet d’entreprise, qui définit notamment la vision collective et formule la mission.
Dans un projet de « trans-mission », il peut être important de réinterroger la raison d’être, le but collectif, les valeurs, les ambitions définies pour préparer et consolider le socle commun. Le projet d’entreprise devient alors le cadre des projets individuels et des transitions, le référentiel commun pour écrire un nouveau chapitre de l’histoire de l’entreprise.Communiquer dès qu’il est possible de le faire pour rassurer et embarquer les parties prenantes, conserver l’unité et la solidarité de la communauté de travail, créer les conditions d’un engagement collectif…
La dimension stratégique et la dimension humaine s'associent pour donner un sens, c’est-à-dire à la fois une direction et une signification, au projet de transmission.*Nombre moyen selon l’estimation de la Direction générale des entreprises, Ministère de l’Economie et des Finances.




